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28 novembre 2005

Phersu :
La rectitude politique a eu des dérives idiotes mais à chaque fois que quelqu'un commence une phrase par "Ce que je vais dire n'est pas politiquement correct mais..." on peut être certain que la suite sera tout aussi crétine, et évoquera l'inconscient d'une taverne.
Pan!

25 novembre 2005

Et tant que j'en suis à râler...

Je me demande si je ne préférais pas encore quand Libé était en grève; au moins, leur manie des jeux de mots dans les titres (qui devient pathologique et donc agaçante au possible) ne les aurait pas conduits à titrer "Une dernière bière pour George Best".

Ce serait encore passable si c'était drôle; ce n'est pas amusant, mais c'est d'un goût exquis les gars, chapeau !

(J'espère au moins que ça fait rire Rotschild ...)

24 trucs à faire pour se rendre plus populo

Laissez-moi vous brosser le tableau. L'article s'appelle "24 trucs à faire avant le retour de Jack Bauer". Les photos qui y figurent sont de pauvres captures d'écran, tirées du générique de la série "24 heures", avec le beau Kiefer Sutherland. Ces photos sont barrées de mentions en Arial, taille 17, jaune pisseux, avec effet de créneau façon VGA Windows 3.0.

Les phrases sont bien, très bien même : il y a, par exemple : "Faut que je me douche", "T'as un mouchoir ? J'ai un truc dans le nez", "Donner un verre d'eau à Lulu" ; "... et aller faire pipi". Bref, du classe, du relevant, et puis surtout, on la sent bien la valeur ajoutée de l'article, hein ?

Le Parisien ? Voici ? Gala ? Entrevue, FHM ? Perdu. Le Monde. C'est ça, leur nouvelle formule ? C'est comme ça qu'ils vont se rapprocher des gens ? Ils comptent franchir le grand fossé qui sépare les bobos Bac+12 des Raouls à CEP, et le tout sans filet ? "Rajoute des prénoms populos, c'est bon pour le lectorat ça coco !".

Si c'est comme ça, j'en ai plein, des idées d'articles pour eux : "Jouer au bowling et boire de la bière sans devoir aller pisser", "Tous les trucs pour pécho en boîte de nuit", "Comment passer à l'arrache aux barrières de péage", "Moi aussi, je peux gruger les vieilles chez Carrefour dans la file aux caisses".

Pfff ... Je deviens vieux ou bien c'est le monde qui rajeunit ?

Le Monde se mélange les crampons

Le Monde nous pond un de ces éditoriaux dont il a le secret; aujourd'hui l'objet de son juste courroux est le rap, et ça ne manque pas de panache. Guillermo se fait d'ailleurs un plaisir de relever les poncifs de l'article.

Quant à moi, un paragraphe me remplit de joie (on a les joies qu'on peut, vous savez ce que c'est, et des joies simples sont le commencement du bonheur ...).

Les chants de haine sont inadmissibles et il y a, dans l'abondante production des rappeurs, des mots qui traduisent les dérives de groupes ou de chanteurs qui recherchent la provocation. Il y a même, dans certains textes, des relents de racisme ou de sexisme. Il ne suffit pas de répliquer que l'hymne national, que d'aucuns voudraient supprimer en ouverture des matchs de football, contient lui aussi des paroles de violence — "Entendez-vous dans les campagnes mugir ces féroces soldats ? Ils viennent jusque dans vos bras égorger vos fils, vos compagnes", etc. — pour justifier ces dérapages du rap. Il n'est pas plus tolérable d'entendre siffler La Marseillaise dans les stades de football que d'entendre des paroles qui incitent à la violence ou à l'incivilité.
Pan! Faute de logique! Récapitulons les propos de notre éditorialiste talentueusement anonyme: premièrement, le rap c'est très violent, et la violence, c'est très laid (tout le monde sait ça : ça met à mal les fondations même de l'Etat blahblahblah). Deuxièmement, la Marseillaise aussi c'est violent, mais c'est pas du tout pareil (l'abruti qui demandera pourquoi c'est pas pareil me fera 20 pompes). Donc, que la conclusion logique de ce paragraphe d'anthologie devrait être "il n'est pas plus tolérable d'interdire la Marseillaise dans les stades de football que d'entendre des paroles qui incitent à la violence ou à l'incivilité".

Mais notre journaliste est plus malin que ça : il se rend bien compte que cette phrase n'a aucun sens et qu'elle n'a donc pas sa place dans l'éditorial du Monde. Donc un joli retourné-boulé en vue : une phrase qui sortie de son contexte est parfaitement censée (siffler la Marseillaise est une incivilité, brûler des voitures aussi), mais qui dans le paragraphe est totalement illogique: la seule logique foireuse qui justifierait ce paragraphe serait que puisqu'il est brillamment démontré -foison d'arguments à l'appui- que les paroles violentes de la Marseillaise ne sauraient se comparer aux éructations de "jeunes énergumènes en rupture de ban", dès lors siffler ces paroles est dégueulasse et Ô combien opposé à l'esprit même de l'Etat qui nous nourrit.

Me fais-je bien comprendre ? Sinon vous me dites, et je recommence ...

22 novembre 2005

Glucksmann et les violences-zurbaines

L'intelligentsia française, suivant en cela l'exemple du Président, s'était montrée remarquablement discrète lors de l'embrasement des banlieues, alors qu'on la connaît autrement présente sur des sujets plus lointains. Après la pluie, le beau temps : voici qu'André Glucksmann nous fait part de son point de vue sur cette délicate question, dans le Monde évidemment.

Les feux de la haine ... Le titre n'est pas mal choisi, même si la référence me semble plutôt faite pour les lecteurs de "Nous Deux" que pour ceux du Monde. Passons sur le début (en fait, la première moitié) de cette tribune que l'on peut me semble-t-il oublier assez rapidement. Un bref rappel des faits, un pont un peu rapide vers le nihilisme ... Tout ça n'est pas loin du Marabout Flash "J'apprends à rapprocher les faits de théories philosophiques".

La partie du milieu a l'avantage de renvoyer la balle au centre : même si ce n'était ni très subtil, ni très habile, Sarkozy n'a pas eu entièrement tort de qualifier les boutefeux de racaille. Dont acte.

J'en vois qui dorment au fond, j'en viens donc à la fin de l'article. Je cite :
"La France, de droite comme de gauche, gagnerait à se contempler dans le miroir que lui tendent les boutefeux. Qui prétend gouverner l'Europe en toute minorité, quitte à déclarer aux pays qui s'émancipent de leur maître russe qu'ils n'ont qu'un droit, c'est celui de se taire ? Qui vote à 55 % contre l'Europe et mêle son bulletin avec ceux des extrêmes et des racistes ? Qui prend le risque de démolir cinquante années d'efforts ? Qui se dit prêt à faire capoter l'OMC et se moque, au nom de nos 2% de paysans, de l'immense misère africaine ? La diplomatie française se comporte dans les rapports internationaux comme s'il s'agissait de purs rapports de nuisance. Hier elle est au mieux avec Saddam, aujourd'hui avec Poutine. Elle traite à l'occasion de "résistants" les égorgeurs de Bagdad".
De prime abord, n'écoutant que mon courage, j'ai un peu tendance à sourire et à trouver le procédé un peu grossier. Même en tant qu'ouiste, j'ai une sérieuse propension à ne pas voir le lien immédiat entre le non à la Constitution et les flambées de violence. Idem pour les autres comparaisons: on passera, par charité chrétienne, sur l'obligatoire référence au tyran Poutine en Tchétchénie - ne tirons pas sur l'ambulance Glucksmann; mais on a peine à croire que la politique discutable de la France à l'OMC favorise l'embrasement. Bon, OK, je caricature, il n'a pas dit ça. Mais sans un minimum de mauvaise foi, tout ça ne serait pas bien drôle.

Ceci dit, passé les premiers sourires (l'amalgame, tout ça tout ça, vous vous souvenez ?), j'y ai réfléchi cinq minutes, et je commence à trouver son raisonnement carrément dangereux, alors que je le trouvais juste assez faiblard sur les bords. Donc, en gros, que nous dit-il, notre philosophe ? Qu'avec une classe politique donnant des exemples nombreux d'amoralisme (on ne saurait qu'aquiescer au moins sur certains exemples), on encourage -il ne dit pas qu'on légitime, mais c'est tout comme- les violences-zurbaines. J'y vois une tentation quasi digne de Saint-Just, une exigence de pureté, une volonté d'absolu moral qu'il prétend peut-être incarner.

En (très) gros, quand les responsables politiques n'agissent pas suivant les canons de la morale (voire même suivant l'Evangile selon Saint-André), ils donnent du grain à moudre aux émeutiers ?

Bref, pour finir, Glucksmann me semble tomber dans les travers qu'il dénonce deux paragraphes plus haut: tout d'abord, il dit que ceux qui accusent Sarkozy de populisme et de pyromanie sont des faux-dèrches qui ne veulent pas voir le problème là où il se trouve. Ensuite, il tombe dans une hypocrisie encore pire qu'un socialiste tendance Hollandiste-Fabiusienne-NPS-Emmanuellistes-Royaliste (c'est tout dire): "c'est la faute aux politiciens, ces gros méchants pas éthiques: après on s'étonne qu'on flambe des bagnoles".

Bref, ce n'est pas encore cette fois-ci que Glucksmann m'a convaincu. Je le trouve populiste, démagogique, et je trouve son raisonnement incendiaire: c'est sans doute aussi en légitimant la violence que l'on donne du grain à moudre à l'extrême-droite.

18 novembre 2005

Rétroactes, comme on dit dans les publications sérieuses.

1. Une ONG belge organise une campagne de publicité en faveur d'une action pour le développement en Afrique. Le spot télévisé montre la "désillusion d'un habitant d'Afrique subsaharienne recevant une enveloppe vide de la Belgique".

2. Le Ministre belge de la Coopération au Développement se dit scandalisé par la publicité. La Belgique consacre environ 0,45% de son PNB au développement (le budget de la Coopération au Développement est plus élevé que celui des Affaires Etrangères, par exemple); le budget 2006 prévoit d'ailleurs d'augmenter de 12,5% les sommes consacrées à l'aide au développement. A titre de comparaison, les USA, qui se proclament premiers bailleurs de fonds, le sont, mais en termes absolus: en termes relatifs, leur contribution à l'aide publique au développement n'atteint pas 0,1% de leur PIB (source).

3. Le Ministre demande donc à l'ONG de suspendre volontairement sa campagne, faute de quoi il lancera une action en justice pour obtenir cette suspension.

Voilà la situation. Je ne prends pas parti ni pour l'un ni pour l'autre, malgré que cette campagne me semble plutôt malvenue et témoigne d'un esprit d'auto-flagellation assez typique de la Belgique. Par contre, la réaction de l'ONG me fait bondir, tant elle témoigne d'une mauvaise foi, d'un sens de l'amalgame et d'une prétention qu'on aurait sans doute pu croire réservés aux hommes politiques: "A l'heure du sommet de Tunis, on peut s'interroger sur le précédent que constitue, dans une société démocratique, la menace d'une action en justice contre une organisation non gouvernementale". On croit rêver ...

Le Ministre estime que l'ONG ce faisant a une légère tendance à se croire au-dessus des lois. J'ai tendance à être de son avis ...

Pour un article complet, voir La Libre Belgique.

14 novembre 2005

10 novembre 2005

Un truc que j'ai toujours du mal à justifier (ça doit être mon côté crypto-fasciste, à moins que ce soit plutôt social-traître, je m'y perds), c'est quand les décideurs politiques prennent une décision dont ils savent parfaitement qu'elle est rejetée par un gros pourcentage de leur population.

Bon, évidemment, ça vaut surtout en matière morale et éthique. Parce que je ne suis pas naïf (ou libertaire) au point d'appliquer mon doute à la réglementation fiscale, par exemple. J'ai dans l'idée que pas mal de citoyens sont très opposés à l'idée même d'une ponction par l'impôt de leurs revenus ...

Par contre, comment et au nom de quoi peut-on arriver à justifier que la classe politique, par exemple, décide de légaliser l'adoption par des couples homosexuels (c'est en bonne voie en Belgique), alors que les sondages montrent qu'une majorité autour de 60% y sont opposés ? Attention, je ne discute pas du tout du bien fondé ou non de la mesure; je n'ai moi-même pas d'avis définitif à ce sujet.

J'en entends qui ricanent au fond sur l'air du "la vache, il n'a même pas compris le concept de démocratie représentative". Je les rassure: si, je l'ai compris. Et j'en suis même en général un chaud partisan. Par contre, quand une majorité, par essence fugace -on connaît l'alternance systématique qui prévaut en Ve République depuis ... longtemps-, puisse faire des choix sociétaux de cette ampleur contre l'avis de sa population (dont on me rétorquera qu'elle est non-éduquée, qu'elle réagit à chaud, qu'elle est rétrograde, etc.), ne va-t-on pas au delà du concept de démocratie représentative ? Elle fait en tous cas des choix qui engagent des générations entières.

J'ai en général suffisamment de snobisme intellectuel pour me méfier du choix de la population et pour croire aux vertus de l'éducation dont sont statistiquement mieux pourvus les représentants publics que l'homme de la rue. Je ne demande donc pas mieux que d'être convaincu; c'est une question que je me pose: "quel raisonnement intellectuel peut conduire à légitimer les choix faits par la classe politique à l'encontre de l'avis de la population, lorsque ces choix ont une lourde portée sociale, morale, éthique, à long terme ?".

08 novembre 2005

Le Monde est cool

Déjà, le Monde avant, c'était cool. Maintenant, avec la nouvelle formule, c'est encore plus cool, avec de vrais morceaux de compréhension dedans.

Donc, le Monde a passé une nuit avec des zyvas émeutiers du 9-3 ... Le résultat est et il est affligeant !

Extraits choisis (je renonce à commenter):

- Alors qu'il les rejoint, Rachid, vêtu d'une grosse doudoune, allume une cigarette et met le feu au local de poubelles. "C'est malheureux, mais on n'a pas le choix" , lâche Nadir.
- "C'est comme un chien contre un mur, il devient agressif. On n'est pas des chiens, mais on réagit comme des animaux", affirme Ousman.
- "On a même brûlé la voiture d'un pote. Ça lui a foutu les boules, mais il a compris".
- "Tu sais, quand on brandit un cocktail Molotov, on dit au secours. On n'a pas les mots pour exprimer ce qu'on ressent ; on sait juste parler en mettant le feu".
- Ils ne dissimulent ni leur satisfaction ni leur "fierté" que les émeutes gagnent l'ensemble du territoire : "Il n'y a pas de concurrence entre les cités. C'est de la pure solidarité."
Franchement, la troisième citation est d'anthologie ...

C'est moi, ou la couverture médiatique de ces émeutes débordements d'une jeunesse affectivement perturbée et laissée volontairement en marge par une société arrogante et néo-libérale laisse franchement à désirer ?

04 novembre 2005

Passage obligé

Ah, ces prix littéraires! Ce marronnier ultime des médias en novembre (mois triste inexplicablement coincé entre la rentrée et Noël), cet alibi douceâtre qui permet, une fois l'an, de s'occuper de littérature, et qui donne cent angles d'attaque vendeurs : "record inégalé de parutions", "quantité n'égale pas qualité", interviews d'une palanquée d'experts germano-pratins pour discourir doctement de la qualité du cru 200..., reportages exclusifs sur une maison d'édition loin des Galligrasseuil, qui se concentre sur la qualité et a bien entendu découvert le jeune talent de l'année, et caetera, ad nauseam.

Et pourtant, la nature est faible ! Chaque année, on ne parvient pas à s'en désintéresser, de ces fameux prix littéraires. On suit, un peu malgré nous, cette course à l'échalote pour écrivains; on scrute (un peu) les listes des sélectionnés, on se surprend à lire l'un ou l'autre article expliquant comment les insiders voient la situation; on parcourt distraitement un article de la presse hebdomadaire qui donne ses pronostics (en général tous faux, à moins qu'on n'interroge suffisamment de penseurs, ce qui permettra normalement de trouver au moins un olibrius qui aura fait le bon pronostic -initialement, ce voyant extra-lucide devrait avoir été publié pour faire bonne mesure).

Alors dans cette optique, l'attribution du Goncourt à François Weyergans -ou plutôt, comme dit Assouline, la non-attribution du Goncourt à Michel Houellebecq- est une plutôt bonne nouvelle.

Déjà, je trouve la tendance de ces (très) vieux jurés à ruer dans les brancards et à aller à l'encontre du verdict attendu un peu jouissive, même si on pouvait s'y attendre. A posteriori, évidemment, c'est facile de dire que le matraquage organisé par Fayard pour son plus fameux débauché allait s'avérer contre-productif.

Ensuite, Weyergans, c'est plus la classe littéraire made in Paris Belgium qu'un Houellebecq qui sue le cap d'Agde et la caravane: avec ses faux airs de Jean-François Kahn Jean-Luc Godard, je l'aime bien, moi, Weyergans. Il sent le tabac chaud, la bibliothèque en désordre, le vieil escalier ciré. Et puis quelqu'un qui appelle sa mère de 91 ans à l'annonce de son prix ne peut être foncièrement mauvais.

Et puis finalement, donner tort à Sollers, même si c'est trop facile (1007 style), c'est aussi assez marrant.